■ Donald Trump, le 2 avril 2025 à la Maison-Blanche, annonçant à la presse de nouveaux tarifs douaniers.
Gouverner c’est prévoir, et dans ce cas on ne peut qu’être surpris, et pour le dire aussi plus crument désolés par les réponses des dirigeants européens à la guerre commerciale déclenchée par Trump hier soir (le 2 avril 2025). Ces réponses oscillent entre le regret, la condamnation et de vagues menaces (« [nous travaillons] à un nouveau paquet de contre-mesures » Ursula Van Der Leyen), mais rien de concret, de tangible et la promesse de nouvelles discussions tendues entre les États membres pour décider de la posture à adopter. Un sentiment d’impréparation et d’irrésolution domine.
Pourtant tout était écrit, annoncé, prévu.
Ainsi le document « Project 2025 » de la Heritage Foundation qui sert de socle idéologique et programmatique à la seconde présidence Donald Trump a été publié en avril 2023. La section 26 du document intitulé « Trade » contient de nombreux éléments sur la politique commerciale à mener. On y trouve des phrases comme: « The U.S. is disproportionately harmed by the WTO’s nonreciprocal tariff regime.” (“Les États-Unis sont lésés de manière disproportionnée par le régime tarifaire non réciproque de l’OMC. ») ou encore « America is the globe’s biggest trade loser and a victim of unfair, unbalanced, and nonreciprocal trade » (« L'Amérique est le plus grand perdant commercial de la planète et la victime d'un commerce injuste, déséquilibré et non réciproque. »). Cela paraît clair.
Ensuite dès le mois de novembre 2024 – bien avant son investiture – le Président américain élu annonce de nouvelles taxes à l’encontre du Canada, du Mexique et de la Chine. Dans la foulée fin décembre l’Europe est déjà dans le viseur. Par exemple dans un message sur son réseau Truth Social il indiquait : « J’ai dit à l’Union européenne qu’elle devait combler son énorme déficit avec les États-Unis en achetant à grande échelle notre pétrole et notre gaz », et il insistait en ajoutant « Sinon, ce sont les TARIFS DOUANIERS jusqu’au bout !!! ». Et ce message en annonçait d’autres du même acabit. Cela paraît clair.
Par ailleurs Donald Trump a des comportements parfois incompréhensibles mais il a une qualité : il dit ce qu’il fait. Nous avions donc tous les éléments depuis de nombreux mois qui permettaient d’anticiper cette politique commerciale agressive.
Dans ce cas-là si on souhaite négocier on négocie avant les annonces et pas après !, et on prépare une riposte qui peut être activée immédiatement si les négociations échouent et non pas après de nouvelles incertaines concertations entre pays européens. En effet nous savons aussi autre chose à propos de Donald Trump : il ne comprend que les rapports de force. Dès lors toute position de faiblesse – et ne pas riposter vite et fort est un signe de faiblesse – le conduira à accentuer sa pression. Or nous semblons incapables d’intégrer la dimension conflictuelle des relations internationales et les risques qu’il faut parfois prendre dans ces relations. Pour sauvegarder nos intérêts nous semblons incapables de montrer les dents, d’être menaçants à notre tour. Nous jouons à un « jeu » en refusant d’utiliser certains coups et in fine nous espérons que la raison prévaudra, comme si nos interlocuteurs étaient des enfants qu’on réussirait à convaincre à force de persuasion polie.
En l’espèce certains dirigeants européens semblent continuer à vivre dans le déni de la fin de la relation amicale avec les USA, tandis que d’autres – Hongrie, Slovaquie – sont les alliés de fait de Trump. Dans cette situation l’Union Européenne semble condamnée à subir, et montre à nouveau son incapacité à prendre des décisions de façon proactive, à aller de l’avant autrement que sous une contrainte extrême. En somme elle illustre son incapacité à gouverner.
Tarifs douaniers annoncés par Donald Trump ce 2 avril, par pays ; les chiffres présentés comme la charge douanière supportée par les entreprises américaines sont plus que contestés.
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