La Res Publica

 Maître Jean-Philippe Carpentier.


Il faut parfois sortir des thèmes d’actualité pour mieux revenir aux questions qui irriguent notre monde contemporain.

S’il est un point qui cristallise les passions, ce sont les influences étrangères qui, curieusement, en irritent quelques-uns au point qu’ils veuillent mettre en péril la liberté d’expression.

Qu’ont-ils à craindre ou à cacher ?

La question mérite toujours d’être posée.

Les influences étrangères sont pourtant vieilles comme le monde et elles sont l’essence même de la politique internationale.

Alors pour appréhender le sujet, de manière dépassionnée, il est bon de se souvenir de l’histoire qui nous enseigne que ces influences n’ont jamais eu besoin de réseaux sociaux pour exister.

L’histoire d’un français, Arnulf de Carinthie, en est un témoignage flagrant.

Né vers 850 et décédé le 8 décembre 899 à Ratisbonne, Arnulf ou Arnoul, arrière-arrière-petit-fils de Charlemagne est le fils, illégitime et non reconnu, du roi de Francie occidentale Carloman et de sa concubine Liutswinde.

L’extinction de la postérité mâle légitime du grand-père d’Arnulf et les qualités intrinsèques de ce dernier le propulsèrent sur le trône d’une province de Francie occidentale.

Il s’allia très tôt avec l’Église, usant de son pouvoir pour favoriser la nomination d’évêques qui, à leur tour, l’appuieront.

C’est par des influences extérieures qu’il assoie sa position, en favorisant, également, les autres souverains qui se partageaient le royaume franc dépecé, tout en maintenant habilement des rivalités entre eux, en modifiant régulièrement ses alliances et en lançant diverses opérations guerrières.

Finalement, après avoir exercé son influence sur le pape, discrédité son rival, joué tour à tour en faveur d’Eudes de France contre son jeune cousin Louis II le bègue et inversement, bref exercé à nouveau son influence étrangère, il unifie l’Europe sous sa bannière.

En décembre 894, il se rend à Rome et comme son ancêtre Charlemagne, ceint la couronne impériale.

C’est ainsi le 22 février 896 que le pape Formose le couronne empereur d’Occident.

Pour relever l’idée européenne et continuer la dynastie Carolingienne, Arnulf a suivi deux voies, les jeux d’influences étrangères et la pression de ses troupes militaires.

Cette histoire est étrangement moderne.

Elle nous rappelle que les influences étrangères n’ont pas de frontière et n’ont même pas besoin d’internet.

L’influence de la France de Louis XVI dans l’indépendance des États-Unis, plus récemment, la défunte France-Afrique n’en ont pas eu besoin.

Les réseaux sociaux ont certes des défauts, mais, par exemple, sans eux les lanceurs d’alertes, vigiles nécessaires du monde libre, n’auraient pas existé.

Demeurent, en revanche, deux points fondamentaux trop souvent oubliés.

Le premier de ces points est le premier élément de la devise actuelle de la France, un principe protégé par la constitution, celui de liberté.

Le second nous plonge dans le respect des individus.

Parler d’influences étrangères, critiquer les votes des uns ou des autres qui seraient mauvais est une insulte à la démocratie, car chacun devant son bulletin de vote a son libre arbitre et mérite le respect. C’est ce que les romains appelaient la Res Publica.

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