Politique & Budget : Encadrer les Pouvoirs

 Audition à l’Assemblée nationale de Pierre Moscovici, Président du Haut Conseil des Finances Publiques / Budget 2025.


La médiatisation de cette fin d’année se concentre essentiellement sur Mayotte et sur les premiers pas de F. Bayrou. Le premier sujet est plus que légitime et le second anecdotique. Les déboires judiciaires de N. Sarkozy prendront également quelques « cases » dans le fil d’info quotidien. Comme toujours, les lunettes audiovisuelles et numériques ont une focale spectacle et les sujets de fond de l’organisation du pays passent à la trappe. Et des millions de Français qui préparent les fêtes à venir se demandent de quel bois ils vont se chauffer en 2025 et suivantes. Entre nous, les pieds dans le tapis de F. Bayrou, la condamnation de N. Sarkozy et les hésitations d’E. Macron ne vont rassurer personne. La liste des noms des ministres ne dira rien d’autre que ce qui a déjà été dit sur ce camembert à trois parts qu’est l’Assemblée Nationale.

Sujet central : La question budgétaire, elle, reste entière. Nous verrons, au fil des semaines et des mois, comment les blablas politiques agités par les médias, réels ou « fake », se transformeront en réalités. Ce sera, à n’en pas douter, à petit pas et sans vision globale. Pour info, les chiffres de cette année sont à retrouver ici : Le budget de l’État voté pour 2024 | budget.gouv.fr.

Regarder vers le privé : L’apport de cet article n’est pas une énième contemplation du désastre mais un témoignage de ce qui pourrait être fait, par une vision miroir du monde des entreprises. Ce que l’on sait, pour la plupart d’entre elles, c’est que le mode de prévision budgétaire et le mode de décision d’investissements sont étroitement liés, mais surtout fortement contrôlés, challengés avant de s’inscrire dans un budget global. Les instances intermédiaires (contrôle de gestion, directions financières, directions générales etc..) n’ont pas qu’un pouvoir consultatif mais un réel poids dans la décision finale. Il s’agit de rassurer les actionnaires et d’obtenir leur consentement pour avancer. Dans cette comparaison idéale, nous serions les actionnaires de la France et l’État la fonction « proposante ». La vertu de cette approche est qu’elle remet en cause l’intégralité des pouvoirs des ministres en charge. La question est : qui doit nous protéger des excès, nous les Français-actionnaires du pays ?

Les dépenses : Aujourd’hui, le Haut Conseil des Finances Publiques, dirigé par Pierre Moscovici (qu’on pourrait comparer aux instances intermédiaires dans l’entreprise), n’a qu’un rôle consultatif alors que les ministères ont celui de décider de suivre ou non ses recommandations. La réalité, au-delà du fait que peu de ministres connaissent ou ont une expérience d’entreprise, est que le politique l’emporte sur le réalisme car aucune compétence de contrôle reconnue n’a le pouvoir de « tamponner » les budgets pour les autoriser. Le HCFP serait cette entité. Il suffirait de faire remonter son pouvoir et de faire redescendre celui des ministères en charge. Cette idée simple est au cœur du chapitre « dépenses » intégrant la dépense publique classique et les budgets de développement. Par ailleurs, il est clair que cette entité a toujours eu une vision prévisionnelle précise, et un « upgrade » de son pouvoir nous aurait épargné les divagations politiques sur les prévisions de croissance et de déficit.

Les investissements : Cette partie-là, au même titre que la dépense classique de fonctionnement de l’Etat, pourrait s’inspirer des évolutions des entreprises depuis les années 80. La montée en puissance de la fonction d’ « acheteurs », destinée à négocier avec les fournisseurs s’est ultra-professionnalisée pour sortir du simple coup de bâton sur le prix pour devenir de réels partenaires constructifs. La distribution a encore des progrès à faire dans ce domaine mais globalement cette fonction a construit un rôle économique majeur car elle crédibilise et acte les investissements dans un cadre global de performance et non plus simplement dans une recherche de baisse des prix. La comparaison avec l’État et les fonctions publiques est criante. Les procès ou instructions judiciaires pour surfacturations dans les campagnes électorales et autres excès non contrôlés ou non déclarés sont légions. Au-delà de l’argent dépensé sans contrôle préalable, c’est aussi une pierre de plus dans le jardin de la crédibilité politique. Les investissements nouveaux vont être cruciaux pour retrouver une souveraineté énergétique à laquelle s’additionnent les progrès écologiques. On ne peut plus simplement faire des appels d’offre, il faut aussi assurer un suivi drastique de la livraison, facturation, gestion etc… Cela peut paraître trivial, tant la « com » politique se gargarise de grands mots mais le diable est vraiment dans ces détails, et les entreprises l’ont compris depuis des lustres. Le HCFP a certainement quelques cartes à jouer dans ce domaine pour autoriser, régler, rejeter ou améliorer ce qui doit l’être.

En un mot, pour sortir de la dette, que l’État propose un vote pour donner ce pouvoir à cette équipe.

Il lui en restera bien d’autres.

En attendant, bonnes fêtes à tous !

Note de l’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

Laissez-nous un commentaire

Plus récente Plus ancienne