Ploutocratie

 Donald Trump, réélu en novembre président des États-Unis.

Par Chem Assayag - Cadre dirigeant dans l’univers du numérique, auteur (poésie et nouvelles), essayiste et blogueur (blog Neotopia).

L’actualité très dense – drame de Mayotte, renversement de Bashar el-Assad, nomination de François Bayrou comme premier ministre – a relégué un peu au second plan ce qui va constituer potentiellement le fait majeur de l’actualité en 2025 : l’arrivée effective de Donald Trump au pouvoir en tant que 47ᵉ Président des États-Unis le 20 janvier prochain. En effet sur de nombreux sujets comme l’Ukraine ou la relation avec la Chine les décisions que prendra Trump auront de nombreuses répercussions à l’échelle mondiale.

Dans ce cadre une des questions qui revient sans cesse est celle de la politique que mènera l’homme du « Make America Great Again » alors que ses processus de décision paraissent souvent erratiques et incompréhensibles. Qu’est-ce qui guidera son deuxième mandat ? Quelles seront ses priorités ? Quel impact pour nous en Europe et en France ?

Paradoxalement il nous semble qu’une partie de la réponse est simple et claire, et qu’il suffit pour cela de prendre la liste des principales nominations annoncées – elles doivent être confirmées par le Congrès – par le futur Président pour son administration. Mais justement examinons ces nominations : 

  • Elon Musk : nommé à la tête du nouveau ministère de l’efficacité gouvernementale, quasiment présenté comme le « coprésident », homme le plus riche du monde, avec une fortune estimée à plus de 400 milliards de dollars,
  • Scott Bessent : proposé pour le poste de Secrétaire au Trésor, ancien gestionnaire pour George Soros, fortune estimée à 1 milliard de dollars,
  • Doug Burgum : Ex-gouverneur du Dakota du Nord, nommé au Département de l’Intérieur, fortune estimée à 1,1 milliard de dollars, grâce à la vente de son entreprise à Microsoft.
  • Howard Lutnick : PDG de Cantor Fitzgerald, pressenti pour le Commerce, fortune supérieure à 1 milliard de dollars,
  • Linda McMahon : co-fondatrice de la WWE, une entreprise de spectacles centrée autour du catch, désignée pour l’Éducation, fortune estimée à 2,5 milliards de dollars.

On pourrait rajouter à cette liste qui ressemble à un classement de magazine économique quelques ambassadeurs comme Tom Barack nommé en Turquie, ou Jared Isaacman, propulsé à la tête de la NASA. Il faudrait aussi, bien entendu, la compléter par Donald Trump lui-même dont la fortune est estimée à 5,6 milliards de dollars par le magazine Forbes.

Nous sommes donc en présence d’un gouvernement de milliardaires, d’ultra-riches, qui font partie d’un groupe minuscule de 3000 personnes au niveau mondial, soit approximativement 0,00004% de la population de la planète. Moins d’une personne sur deux millions !

Et ce type de gouvernement a un nom, c’est une ploutocratie - du grec ploutos : dieu de la richesse et kratos : pouvoir – c’est-à-dire un système de gouvernement où la richesse constitue la base principale du pouvoir politique. En résumé pour faire partie de la tête de l’administration Trump le critère primordial, avec celui de l’allégeance au chef, est le nombre de zéros alignés sur son compte en banque.

La compétence, les idées, la recherche de l’intérêt général ne sont plus alors que d’aimables colifichets qu’on affiche – et dans le cas de certaines personnes nommées par Trump il n’y a même plus ce souci d’affichage tant leur profil est éloigné de toute légitimité politique – pour vaguement donner le change, car ce qui compte vraiment c’est de faire partie du club. Et comme dans tous les bons clubs qui se respectent l’objectif des membres est de défendre leurs intérêts, partout et sans relâche, c’est la priorité numéro un. Aussi au-delà des postures et des discours l’administration Trump aura pour boussole la défense de l’intérêt des ultra-riches et si possible la création d’opportunités pour devenir encore plus riches. On peut ainsi parier que la fiscalité leur restera très favorable, que les subventions publiques à certains secteurs et certaines entreprises bien ciblées seront perpétuées, ou encore qu’on privatisera les activités publiques susceptibles de constituer de beaux marchés rentables pour des acteurs privés. On peut aussi parier que les relations internationales seront surtout guidées par la possibilité de faire du business pour les plus fortunés, toujours plus de business.

C’est à cela que nous devons nous préparer, et si Donald Trump restera pour une part imprévisible, gardons à l’esprit, que désormais la démocratie américaine est devenue une ploutocratie, et que cela influera sur son fonctionnement et ses choix.

Laissez-nous un commentaire

Plus récente Plus ancienne