■ Chaos.
Vous avez surement entendu parler de l’acronyme V.U.C.A; il s’agit d’un concept basé sur les théories de leadership de deux chercheurs américains, Warren Bennis et Burt Nanus, qui décrivent la volatilité (V), l’incertitude (U pour Uncertainty en anglais), la complexité (C) et l’ambiguïté (A) des conditions et des situations du monde actuel auxquelles doivent faire face les managers et leaders. Il a été développé dans le contexte de la fin de la guerre froide et introduit formellement en 1987 par le U.S. Army War College. Sa popularité a vraiment décollé à partir des années 2000 et il était fréquemment utilisé pour décrire l’état de notre monde marqué par les progrès technologiques, la globalisation et un capitalisme financiarisé. Or on peut sans doute penser que ce concept est désormais obsolète pour décrire l’état du monde et que la bascule a eu lieu avec l’épidémie de Covid.
Ici il faut se rappeler qu’il y a 5 ans quasiment jour pour jour un étrange virus apparaissait en Chine ; il allait plonger le monde dans une situation totalement inédite entraînant le confinement de milliards de personnes, la mort de millions d’individus et le quasi-arrêt de l’économie planétaire. A l’époque on avait vu fleurir les discours sur « le monde d’après » qui émergerait après l’épidémie de Covid-19, un monde plus apaisé, plus sobre, plus désirable. Le monde d’après a effectivement surgi et il a, au contraire, un visage effrayant.
Sur fond de dérèglement climatique de plus en plus visible et aux conséquences dévastatrices, nous avons assisté en quelques années au retour de la guerre en Europe avec l’invasion de l’Ukraine, à l’embrasement du Proche Orient à la suite des crimes du Hamas du 7 octobre 2023, et à la réélection de Donald Trump pourtant donné pour « mort politiquement » début 2021. Jusqu’à la question de la menace nucléaire qui revient sur le devant de la scène géopolitique ! Autant de facteurs de déstabilisation du monde annonciateurs de jours sombres.
A l’échelle française la majorité fragile obtenue à la suite de la réélection d’Emmanuel Macron en 2022 et la séquence politique illisible ouverte depuis la dissolution de cet été semblent illustrer ce nouveau monde insaisissable.
Pour caractériser ce nouvel état on pourrait désormais utiliser l’acronyme B.A.N.I qui a émergé depuis 2020, notamment à l’initiative de Stephan Grabmeier, un designer et académique allemand.
B.A.N.I c’est B pour Brittle (fragile), A pour Anxieux, N comme Non Linéaire et I comme Incompréhensible. D’une certaine façon B.A.N.I poursuit et amplifie les tendances identifiées par V.U.C.A (par exemple le complexe devient non linéaire, l’ambigu devient incompréhensible) dans un mouvement qui semble devenir incontrôlable et inquiétant. Pour le dire autrement le monde qui vient s’annonce, hélas, chaotique.
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