■ Drapeaux de l’Organisation des Nations Unies et de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord.
Depuis la seconde moitié du siècle dernier, et il y a quelque temps encore après 2000, le mot « dissuasion » était automatiquement associé au mot « nucléaire ». Chez nous, l'année 1964 marqua le début de la permanence de la dissuasion nucléaire française. En effet, le 14 janvier, les Forces aériennes stratégiques furent créées. Mais l’équilibre nucléaire du monde a récemment engendré des formes multiples de dissuasion, allant des pires menaces meurtrières de guerre entre nations, aux simples dialogues politiques destinés à gérer le quotidien. Une sorte d’échelle descendante de la dissuasion apparaît désormais quotidiennement, comme une nouvelle donne de l’échange entre personnes, entre partis politiques, entre nations, entre Est et Ouest, entre Nord et Sud.
Du nucléaire au conventionnel : En Ukraine, le Kremlin a récemment déployé (21 nov.) un tir « d’essai » en conditions réelles du missile balistique de moyenne portée, baptisé «Orechnik » sur la ville de Dnipro. Aucune tête nucléaire à bord mais de quoi démontrer ce que peut atteindre l’armement conventionnel du Kremlin dans cette guerre inégale. La crainte nucléaire existe toujours, mais dans sa finalité « sans vainqueur » a fini par perdre de son sens. Le développement d’armes conventionnelles terrorisantes ou surpuissantes vient petit à petit remplacer le grand frère vitrificateur comme une menace plus réaliste, plus immédiate, et donc beaucoup plus effrayante. Les progrès des lanceurs et autres technologies de visée à distance ont créé un champ de développement d’armes « utilisables » que ce soit sur le terrain ou sur les tables de négociation, sans disparition de la planète en toile de fond. « Si tu veux la paix, montre la guerre » semble être la tendance, comme c’est le cas au Proche-Orient. Ces nouveaux moyens seront, y compris pour l’Occident, un axe de développement industriel de l’armement, pour équilibrer les forces conventionnelles téléguidées.
Politique : de l’échange à la menace. En France, sur les bancs de l’Assemblée et au plus haut niveau de l’État, on assiste à une réplique politique de la dissuasion. Il en va de même chez notre voisin allemand, même si les formes semblent plus policées. La comparaison avec la dissuasion militaire peut paraître tirée par les cheveux mais à bien observer les comportements et les tensions, on s’aperçoit que les arguments ultimes se développent plus vite et plus violemment entre les élus locaux ou nationaux et le pouvoir. Il y a, certes, des enjeux politiques inédits après cette maudite dissolution, mais cela justifie-t-il les attitudes de type « dissuasives ». M. Le Pen est la championne du moment pour faire céder M. Barnier sur le budget, la dissuasion étant ici celle de la possible censure du gouvernement. Chez LFI, on gère les socialistes de la même façon avec la menace de la disparition d’une existence représentative s’il y a dissidence. Peu importe les bons ou mauvais calculs qui pourraient être faits dans une sorte de morale politique, on constate qu’il y a des leaders qui gèrent « à la Poutine » leurs ouailles ou leurs adversaires. Les traditions d’opinions politiques opposées dont le débat civilisé tient lieu de champ de bataille est révolu. La dissuasion est l’antichambre de la violence, et le dernier argument avant elle. Les ultimatum en sont l’expression.
Société : jusqu’aux citoyens. Aux États-Unis, la dissuasion a été l’argument principal de D. Trump pour gagner de loin cette dernière élection. Cela a fonctionné pour de multiples raisons que les experts ont décortiquées, mais au fond, la culture américaine est toujours imprégnée de l’esprit du bien contre le mal, quel que soit ce bien ou ce mal. Dans ce cadre, la menace de terreurs à venir fonctionne sur des électeurs qui n’y croient pas vraiment mais qui « héroïsent » le candidat qui use et abuse de cette dissuasion. Autrefois on promettait un avenir (JFK), aujourd’hui, on protège de l’avenir. En anglais, ça marche mieux.
Dissuasion écologique : Plus proche de nous, mais néanmoins planétaire, le réflexe écologique, qui devrait être une occasion de grandes avancées technologiques et sociétales, s’est transformé au fil de ce siècle en menace ultime, comme une dissuasion sur le fioul, l’essence, la voiture et tous les outils à transformer. Personne ne nie qu’il faille changer les objets et les mentalités, c’est une évidence, mais les coups de marteau relayés par les médias des degrés montants qui vont nous réduire à néant ne font avancer personne. On voit bien que le climat change, mais tout n’est pas perdu.
On dissuade de faire des enfants pour cause de planète malade alors même que ces potentiels nouveaux arrivants auront peut-être, voire sûrement, les attitudes et les solutions qui sauveront le monde. Laissons-leur une chance, et peut-être que l’O.N.U. devrait ouvrir ce dossier-là.
Car dans ce cas, dissuader c’est disparaître.
Note de l’auteur
Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.
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