Sortir des turbulences de notre temps

 Maître Jean-Philippe Carpentier.

Par Maître Jean-Philippe Carpentier - Avocat au barreau de Paris, consul honoraire du Luxembourg avec juridiction sur la Normandie et Président du Corps consulaire de Normandie.

Nous vivons, en quasi-permanence, avec des manifestations et protestations qui émaillent notre actualité.

Nous avons tous en mémoire les émeutes de fin juin 2023, la crise des agriculteurs, tant en France que dans le reste de l’Europe, ou les protestations en lien avec les prochains jeux olympiques.

Ces dernières ont conduit des manifestants à enflammer les anneaux olympiques de Paris en signe de protestation contre l’organisation des jeux cet été, tout en se positionnant dans le cadre d’une demande d’augmentation des salaires.

Nous ne sommes pas face à des événements disparates, mais face à une tendance lourde.

Une étude mondiale, rapportée dans la revue américaine Nature nous apprend que le nombre de protestations annuelles a plus que triplé entre 2006 et 2020, en lien avec l’augmentation de l’activisme au niveau mondial.

Lisa Mueller, un chercheur qui étudie les mouvements sociaux au Macalester College de Saint Paul, dans le Minnesota précise que « cette augmentation de l’activisme a même éclipsé les turbulentes années 1960 ».

Elle va jusqu’à affirmer que « nous vivons vraiment une période empiriquement exceptionnelle de protestations mondiales ».

Cependant, et alors que certains annoncent presque la guerre civile, il est légitime de se demander si ces protestations ont un effet réel.

Sur ce terrain, les chercheurs ne sont pas unanimes et la réponse est tout simplement « ça dépend ».

Alors que notre actualité est souvent emplie de violences, avec l’ultra gauche et les « black block », il est intéressant de noter que la violence n’est la voie la plus efficace.

Nous vivons, en quasi-permanence, avec des manifestations et protestations qui émaillent notre actualité.

Les campagnes de protestation non violentes sont deux fois plus efficaces que les campagnes ultra-violentes.

M. Chenoweth, qui étudie la résistance civile à la Harvard Kennedy School de Cambridge, dans le Massachusetts estime, par exemple, que la révolution « People Power » des Philippines qui a chassé le dictateur Ferdinand Marcos en 1986 avait près de deux fois plus de chances d’aboutir à un changement de régime que son équivalent armé.

La participation aux protestations et leur éventuelle répression qui les rendraient sympathiques sont d’autres facteurs mis en avant par les scientifiques.

Par ailleurs, dans son article dans Political Sciences du début 2024, Mme Mueller arrive à la conclusion que les militants ont plus de chances d’obtenir des concessions s’ils ont des revendications cohérentes.

L’incohérence des revendications est, du reste, la raison principale de l’échec des Jacqueries en France.

Certains chercheurs universitaires politisés vont même jusqu’à rechercher les solutions les plus efficaces pour favoriser l’activisme politique.

Que faire de tout cela dans le contexte actuel ?

Avant toute chose, il ne faut pas céder à la violence.

Il faut se souvenir que Louis XIV a calmé les Jacqueries à la fin de son règne, en écoutant les raisons des colères paysannes et en les entendant.

Une politique fiscale favorable, une décentralisation insufflant un esprit de cohésion autour du bien commun et le retour de la croissance et de la prospérité économique furent les ingrédients de la fin des révoltes.

La méthode était simple, sortir de l’idéologie, écouter et entendre les revendications, mettre en place des réformes avec trois axes, l’amélioration du pouvoir d’achat par la baisse de la pression fiscale, le retour à une paix publique assortie de la sécurité des personnes et la recherche de la cohésion nationale.

Notre monde contemporain n’est, finalement, pas si loin de cette période.

J’avais appelé à transcender les clivages partisans de tous bords, à rejeter la barbarie et l’antisémitisme, pour nous concentrer plus que jamais sur l’intérêt général en considérant les choses sur un temps long, puisque tout ne peut pas se faire en un jour.

C’est ce qui fait défaut dans notre monde où les actions et réformes sont le plus souvent en réaction immédiate aux événements, sans que soit prise la distance nécessaire.

Il faut surement retenir la nécessité d’entendre les attentes de la population, et de proposer des réponses cohérentes fondées sur une ligne claire centrée sur le bien commun.

1 Commentaires

  1. Quelles sont exactement les attentes de la population qui elle même ne peut être définie comme un tout unique mais un ensemble de groupes aux attentes différentes voire diamétralement opposées ?

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