Marie-Antoinette, splendeurs et chute de la Reine la plus calomniée de France

 La reine Marie-Antoinette

 
Par Sofia Azzouz - Historienne de l’Art et conservatrice au Ministère de la Culture.
 
Parler de Marie-Antoinette relève toujours du défi. Il est impossible d’être exhaustif, nous ne le serons pas, et il est nécessaire d’être passionné. C’est cette passion que nous tentons d’insuffler ici.

C’est l’histoire d’une femme qui fut mariée à 13 ans, victime expiatoire d’une époque en mutation. Rarement une Reine de France aura connu autant de calomnies ni suscité autant de critiques. Pourtant Zweig l’a dépeinte, tant il était passionné par ce destin romanesque, comme si Marie-Antoinette, héroïne romantique, était déjà condamnée d’avance. Nous vous proposons un retour sur sa destinée incroyable dont la chute funeste a mis en valeur sa grandeur d’âme.

La place réservée aux femmes dans les récits de l’histoire de France ne rend guère justice au rôle qu’elles ont jouées au fil des siècles. Pourtant nombreuses sont les rebelles, comme Jeanne d’Arc, et encore plus nombreuses, les femmes politiques au rôle de premier plan. Aliénor d’Aquitaine a façonné l’Europe et dirigé d’une main de fer de nombreux territoires dans deux pays. Les régentes, Blanche de Castille, Catherine de Médicis, Anne d’Autriche ont gouverné la France. Anne de Bretagne a su imposer pour le pays qu’elle apportait en dot des règles encore applicables de nos jours. Marie-Antoinette, par les passions qu’elle cristallise ne laisse jamais indifférent.


I. Un début à manière d’un conte de Perrault

Pourtant tout commençait si bien ; un conte de Perrault. Elle a à peine 13 ans et déjà la belle archiduchesse est le fruit de toutes les convoitises. La diplomatie s’affaire sous le ciel viennois ; la Marquise de Pompadour et le Ministre Choiseul scellent au nom du roi de France, avec l’Autriche de Marie Thérèse les termes d’une union qui pacifiera les rapports entre la France de Louis XV et l’Empire des Habsbourg-Lorraine. Afin de mettre un terme à une guerre interminable, la jeune archiduchesse épousera le Dauphin Louis Auguste.

Le mariage sera tardivement consommé et le couple attend 7 longues années. Le dauphin souffre d’un phimosis. Marie-Antoinette s’en émeut dans ses lettres à sa mère. Cette situation enclenchera le début de la spirale des années sombres. La future Reine de France ne sera jamais heureuse à la cour de France, car elle s’y ennuie au milieu de courtisans compassés.

II. La Reine et le peuple : prémices d’un amour - haine

Le 18 Août 1777, son mariage est enfin consommé. Les enfants paraissent et le peuple de France est satisfait.

Mais la Reine, qui ne connaissait que trop les rigueurs de l’étiquette, s’éloigne et cherche à Trianon une vie fantasmée, presque bourgeoise.

Elle dépense aussi, sous l’influence de courtisans parfois mal intentionnés.

On évoque certes souvent les fracas de La Reine, mais on oublie aussi trop souvent ce qu’elle a donné aux arts et lettres.

Elle allège le protocole et lance les tendances. Avec Rose Bertin, son habilleuse, en réalité la première fashion designer de l’histoire, Marie-Antoinette pose les bases de ce qu’est aujourd’hui un des fleurons de la France, le secteur de la haute couture.

C’est, naturellement, une admiratrice des arts et des artistes qui fait la réputation, par exemple, d’Elisabeth Vigee-Lebrun.

Et pourtant, comme son époux, elle sera prise dans la tourmente révolutionnaire.

III. La tourmente révolutionnaire

Cet article n’est naturellement pas le lieu d’une exégèse de la révolution.

Phénomène avant tout bourgeois, la révolution conduira Marie-Antoinette à Paris où elle sera jugée.

Elle apparait comme opposante politique et les hommes de la Terreur veulent l’abattre.

Pour revenir à notre monde contemporain, il est aisé de voir l’ambiguïté que suscite cette situation.

Le même homme politique arrive à trouver scandaleuse la mort de l’opposant russe Navalny, parce que c’est un opposant politique, et à clamer son admiration pour Robespierre qui réservait à ses nombreux opposants le sort de Navalny, la mort. Le scandale face au traitement des opposants politiques est parfois à deux vitesses.

IV. Un procès truqué

Dans sa longue et tragique marche vers l’échafaud, Marie-Antoinette sera une victime expiatoire, à la fois Reine condamnée et femme adulée.

Après le désastre de la fuite vers Varennes, elle sera enfermée à la Conciergerie. Le procès sera une longue salle d’attente interminable vers la mort.

Le 14 octobre 1793 à 8h30, elle aura 38 ans dans quelques semaines, Marie-Antoinette est déjà malade, ses cheveux sont blanchis et elle porte le deuil de Louis XVI son époux.

Elle se présente dignement devant ses juges et pendant 2 jours et 2 nuits, elle fait face au terrible accusateur public Antoine Fouquier-Tinville, un jeune magistrat originaire du nord de la France, qui requiert contre Marie-Antoinette avec un dossier vide et une seule ambition porter le coup de grâce à la royauté.

Son accusateur ne le sait pas, mais il subira le même sort que celle qu’il accusa, la décapitation en place de Grève, moins de deux ans après la Reine.

V. La dignité dans la mort

Marie-Antoinette répond dignement à toutes les attaques, même les plus sordides, comme celle d’un prétendu inceste « Si je n’ai pas répondu, c’est que la nature elle-même refuse de répondre à de telles accusations faites à une mère. J’en appelle à toutes les mères !
»

Tout était joué et c’est avec une grandeur d’âme peu commune que Marie-Antoinette écrira dans son testament « Je pardonne à tous mes ennemis le mal qu’ils m’ont fait ».

C’est sur ces paroles que nous clôturons cette évocation, sans concession, de celle qui a été et restera une icône, une Reine, une femme et une mère qui ne laisse jamais indifférent, quoi qu’on en pense.

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