Villèle : « Acquitter tout en tout ou en partie une dette de l’État régulièrement justifiée »

 Façade de Wall Street, à New-York (© John Moore).


À l’heure où des agences de notation viennent censurer la gestion des États et parfois même dicter leur avenir, avec des conséquences dramatiques sur les peuples comme ce fut le cas en Grèce, il est sûrement bon de se rappeler de la nécessité de l’orthodoxie budgétaire.

Dans ce contexte, se replonger dans le texte de l’ordonnance du 22 septembre 1822 prise sous l’égide de Monsieur de Villèle, ministre des Finances de Charles X, permet de prendre un peu de
hauteur et de revenir à des principes simples.

Le premier principe est celui de l’orthodoxie budgétaire.

Un ministre des Finances fort se doit d'imposer une discipline budgétaire aux plus indociles des ministres dépensiers

Les règles de comptabilité publique sont simples et unifiées.

Mais surtout Villèle mettra en place un contrôle des circuits de recettes e
t de dépenses.

L’article 10 de l’ordonnance du 22 septembre 1822 met les choses au point :

« Toute ordonnance de paiement et tout mandat résultant d’une ordonnance de délégation doivent, lorsqu’ils sont présentés à une des caisses de notre trésor, être accompagnées des pièces qui constatent que leur effet est d’acquitter tout en tout ou en partie une dette de l’État régulièrement justifiée ».

Il est tout d’abord prévu de documenter les raisons qui génèrent un paiement public, cette obligation est toujours de rigueur.

Mais surtout est mis en place un contrôle de la justification sur le fond de la dépense publique.

C’est bien là que Villèle est moderne.

Il veut lutter contre le gaspillage des fonds publics et s’engage dans le contrôle de leur utilisation.

Annualité, spécialité, universalité et unité de la dépense publique sont autant de principes fermement affirmés.

Villèle met en place une gestion budgétaire qui lutte contre les dérapages budgétaires, si caractéristiques de la révolution et de l’empire.

Son exemple ne sera pas suivi et dès l’arrivée au pouvoir du fils de Philippe-Égalité, les pratiques anciennes reprennent le dessus, les principes de Villèle sont battus en brèche ; la France et ses exécutifs successifs repartent dans le dérapage budgétaire.

Quels enseignements tirer aujourd’hui de ce que l’on pourrait appeler la méthode Villèle ?

Force est de constater que la situation d’endettement complique fortement les choses, mais les principes qui sont dégagés en 1822 apparaissent, deux cent deux ans plus tard, d’une modernité déconcertante.

Le contrôle de la dépense publique s’impose.

La discipline budgétaire s’impose tout autant.

Par ailleurs, nous aurions un grand intérêt à analyser de manière plus systématique l’impact de chacune des dépenses publiques, qu’elle soit au niveau national ou au niveau local.

Il ne faut pas opposer les dépenses nationales et celles des collectivités locales, il faut simplement les traiter de manière identique dans l’analyse de leurs effets.

C’est, en revanche, cette analyse de l’impact et de l’effet des dépenses publiques sur le bien-être de tous les habitants, mais également de l’économie, qui permettra de mieux flécher ces dépenses et de les réorienter vers leur réelle utilité, c’est-à-dire vers le bien commun.

Arrêter le gaspillage de l’argent public est aujourd’hui essentiel.

Nous devons en effet retrouver les moyens de payer notre dette abyssale et de réduire nos déficits.

Et pour en revenir aux agences de notation qui gouvernent, en quelque sorte, le prix sur les marchés de l’argent public une question doit être posée qui ne l’est jamais véritablement publiquement : « qui rémunère ces agences ? »

La réponse est à la fois simple et alarmante.

Actuellement, les agences ne demandent pas de rétribution aux États qu’elles notent.

Cependant, les agences de notation sont rémunérées par les émetteurs des produits soumis à notation.

Il existe ainsi un risque de conflit d’intérêt et de situations où les agences pourraient être enclines à fournir à leurs clients, des notations accommodantes.

Finalement, cette situation justifie un contrôle accru de la déontologie de ces agences, assorti d’un contrôle de l’utilité et de l’efficacité de la dépense publique.

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