Élections européennes : La Politique Génération Y

 Principales têtes de liste aux élections européennes : R. Glucksmann, F.X. Bellamy, L. Deffontaines, V. Hayer, M. Toussaint, J. Bardella, .M. Maréchal, M. Aubry.


Les « Y » : La génération dite « Y », ou « millennials », regroupe l’ensemble des personnes nées entre le début des années 1980 et la fin des années 1990. Sans se focaliser sur les âges réels de chacune des personnalités politiques en action aujourd’hui, on retrouve au sommet de la visibilité média un grand nombre de trentenaires/quarantenaires, parfois même plus jeunes, ce qui équilibre un peu la moyenne d’âge de l’univers politique. C’est particulièrement vrai pour les têtes de liste aux européennes, mais aussi au sommet de l’Etat, le tandem Macron-Attal étant représentatif de la tendance, députés inclus : l’âge moyen de l’Assemblée Nationale est passé de 54 ans à 49 ans entre 2012 et 2017. Une fois ce constat réjouissant fait (le rajeunissement est toujours bon à prendre), il reste quand même quelques questions en suspens.

Le poids du pouvoir : La bataille des partis se joue sur fond d’élections européennes, comme une sorte de point d’objectif. Mais la réalité va bien au-delà de cette cible de suffrages. Gabriel Attal, « Y » en chef (35 ans), hérite de la position la plus difficile et la plus simple « en même temps ». Il n’est pas candidat et n’a donc pas d’échéance électorale à court terme. Mais il doit aider V. Hayer. Or les sujets sont nombreux et souvent liés à l’Europe : agriculture, accords avec le Canada, budget et dette, fiscalité (rentes), choc des savoirs (éducation) etc.. Et tous les résultats ne peuvent pas être là. La rançon du pouvoir en période électorale est douloureuse car les candidats promettent alors que les dirigeants doivent livrer. Et V. Hayer doit évoquer les deux et rester convaincante. La barre est très haute.

Pour s’en sortir avec le public, trouver une forme de connivence et séduire, les politiques de la génération Y utilisent un mélange de méthodes « old school », interviews dans les journaux et quelques plateaux TV mais également l’ensemble de la planète numérique pour augmenter la chambre d’écho. Ils ont grandi avec l’espace virtuel. L’utilisation de « BeReal », sorte de TikTok édulcoré par une caméra 360° rend la communication très quotidienne et assez ludique. X-Twitter, Facebook, Pinterest, LinkedIn deviennent petit à petit les « médias sérieux de Papa ». Les web TV sont légions, les selfies alimentent un réel de rue et les discours se noient souvent dans les flots d’images et d’apparitions courtes, bien plus relayés qu’un débat ou une interview. La génération « Z » sera celle de l’I.A., mais d’ici-là, la politique « Y » devra naviguer dans toutes les eaux numériques de source encore humaine et d’une profondeur discutable.


V. Hayer, (38 ans) bombardée tête de liste, n’hésite pas à s’exposer. C’est le pari obligatoire : se faire connaître au risque de se faire ignorer. Franchement, cette mission n’est pas un cadeau pour elle, héritière de bilans contrastés et forcément contestés. L’aide de G. Attal est solide mais il associe V. Hayer, par nature, à ses propres soucis du moment. Il n’a pas la vie facile, car les actions lancées ne retombent pas encore en résultats. Toutefois, son exposition solitaire lors des questions au gouvernement remplit la case « combat » même si elle reste dans le champ parlementaire. Pour V. Hayer,(+/- 19%), les plateaux TV et tout ce qui fera grimper la notoriété reste bon à prendre. Pour convaincre, il lui faudra un ou deux événements « résultats » du côté de G. Attal.

R. Glucksmann, (44 ans) porteur d’une voie de gauche traditionnelle mais, disons, plus combative que celle d’O. Faure (ce n’est pas difficile) et hors NUPES, tire assez bien son épingle du jeu (+/- 12%). Il ne sera pas dans le top deux, mais il pourra compter, et tenter de redorer un blason bien poussiéreux. Exister, pour la gauche modérée, c’est déjà une victoire. Son média : Web TV (Blast), presse, Instagram, Tik Tok. L’énergie « Y » fonctionne ici, bien qu’il soit presque sorti de cette catégorie d’âge.

F.X. Bellamy, (38 ans) agrégé de philo, va avoir besoin de ses connaissances et réflexions pour surmonter l’impossible : faire de LR une force pour l’Europe, prélude aux autres échéances. Malheureusement ce n’est pas le groupe le plus jeune, dans les corps et dans les têtes, malgré ce « Y » en première ligne. France Info, l’Opinion, Le Point, La Croix…On n’est pas dans le « Y », avec un +/- 7 à 9% à remonter d’urgence.

RN (JB 28 ans) et Reconquête (MM 34 ans) : Parfois, le choix de médias permet de disparaître sans le dire. Jordan Bardella sèche les débats sur des plateaux grand public pour s’exprimer dans des zones numériques plus confortables. Pour s’échauffer, peut-être, ou pour éviter la comparaison oratoire avec Marion Maréchal qui n’en ferait qu’une bouchée (On la retrouve sur Instagram et Tiktok). Tant qu’ils se mangent entre eux… M. Le Pen et E. Zemmour risquent aussi leur avenir politique face à ces « Y » car leurs candidatures aux prochaines présidentielles n’iront pas de soi. Les médias qu’ils fuient tous : La Voix du Nord, France3, Libé, Quotidien, Le Monde, Rue 89, Mediapart, etc…

Constat : E. Macron (46 ans) a fait avancer dans son sillage une génération Y en politique. Il a été suivi dans ce management de renouvellement et d’héritage par l’extrême droite. On ne peut donc jamais rien promettre sur les effets d’une stratégie quand on dirige l’État, car l’énergie « Y » marche mieux lorsque rien ne peut être reproché. En effet, l’électorat de la majorité relative actuelle est plutôt âgé est constitue son socle, alors que l’extrême droite puise chez des électeurs plus jeunes et plus urbains qu’auparavant avec les résultats potentiels qu’on connaît (Bardella +/- 30%, Maréchal +/- 7%).

La promesse face à la livraison : c’est un combat forcément injuste et ne jamais avoir gouverné rend les selfies et les vidéos Tiktok plus efficaces sur les votes.

La démocratie « Y » pourrait bien s’en mordre les doigts.

Note de l’auteur

Cet article ne représente pas une critique sur le fond des personnes publiques, mais une analyse des choses perçues, des risques liés aux communications du monde politique et des enjeux de celles-ci. Les noms cités ne le sont que pour comprendre leur impact au travers de décisions, de déclarations ou de comportements médiatisés.

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