« Tota Pulchra », les Invalides, les JO Paris 2024 et la Sécurité Sociale

 Maître Jean-Philippe Carpentier.


« Tota Pulchra », toute belle, cette locution latine nous rappelle les beautés du monde qui nous entoure, non du monde virtuel, mais du monde réel.

La fondation éponyme, « Tota Pulchra », animée par Monseigneur Jean-Marie Gervais, Préfet coadjuteur du chapitre de la basilique Saint-Pierre au Vatican met, chaque semaine, l’Art en avant et nous rappelle, par ses actions éclatantes, combien l’Art fait partie de ce qui nous rassemble et j’y suis particulièrement sensible.

C’est en écoutant le chanteur classique Raúl Gámez que ma vue s’est portée, par hasard, sur le dôme des Invalides, dans un contexte où ce monument est l’épicentre d’une bien curieuse polémique, en lien direct avec l’Art et les commandes publiques.

Certains reprochent à l’affiche des Jeux Olympiques 2024 de représenter Paris sans rester fidèle aux racines de la France, au motif que la croix surmontant le dôme des Invalides n’a pas été représentée.

Je vous invite à regarder cette affiche de près.

Il n'y a pas que la croix qui a été supprimée, il manque aussi les trois statues qui représentent les vertus théologales (foi, espérance, charité) et bien d'autres choses encore.

Comme je suis charitable, je ne vois qu'un dessin approximatif d'un Paris fantasmé, une caricature, tout au plus, et chacun sait qu'un dessin ou une caricature n'ont pas d'importance.

Pour autant, les Invalides, s’ils ont un caractère religieux dans la composition de leur dôme, ont une place et une symbolique dans l’histoire de France qui va bien au-delà de ces symboles effacés par le dessin.

Un peu d’histoire permettra certainement de réconcilier les points de vue autour de la nécessaire solidarité intergénérationnelle et de la protection sociale.

Louis XIV, en 1670, décide, par décret, la construction des Invalides, un hôtel qui avait vocation à accueillir les officiers et soldats « estropiés, vieux et caducs » ayant servi la France.

Considérant cette institution comme la plus utile de son règne, Louis XIV affirmait « Il est bien juste que les soldats, qui, par leurs longs services et leur âge, sont hors d’état de travailler et de gagner leur vie, aient une subsistance assurée pour le reste de leurs jours (…) et y trouvent aussi une retraite honorable ».

L’Édit de Nancy du 22 septembre 1673 complétait l’ouvrage par une Caisse des invalides de la Marine Royale, le premier régime spécial de retraite de l’histoire, d’où allaient germer les idées fécondes aboutissant au régime de retraite par répartition français actuel.

L’Assurance Maladie a aussi émergé à la même époque et l’Édit de juillet 1720 codifiait, par exemple, pour les marins, les principes de l’hospitalisation « gracieuse », des indemnités journalières de demi-solde, des délégations de solde en faveur des familles des marins restées à terre, et une retraite complémentaire.

Certes tout le monde n’était pas logé à la même enseigne, mais dans chaque métier, les corporations pourvoyaient à la solidarité intergénérationnelle. Elles ont été supprimées en 1791 par la loi le Chapelier.

Le XIXe siècle a vu diverses initiatives, comme la mutuelle impériale de 1852 créée par Napoléon III.

C’est finalement sous l’impulsion du Gouvernent provisoire du Général De Gaulle que les Ordonnances des 4 et 19 octobre 1945 ont posé les bases de notre Sécurité Sociale actuelle.

Modifié, remis en cause, amélioré, le système aiguise souvent les passions. Cependant, il est toujours là et conserve les grands principes du XVIIe siècle : la solidarité intergénérationnelle de la protection sociale, la couverture de la maladie et des principaux risques, la retraite, et, encore aujourd’hui, les régimes spéciaux.

Il existe, certes, des crises, notamment la crise des urgences, le Professeur Joly en déjà développé les contours dans le Contemporain, mais il faut rester positifs et optimistes, le système bien que mis à rude épreuve, perdure pour le bénéfice de toute la population.

S’il est un point qui peut rassembler, c’est bien cette idée, dont les bases ont été posées il y a 354 ans, aux Invalides, justement, celles de la Sécurité Sociale dont la France peut, à juste titre, s’enorgueillir.

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